Cent vingt agents pastoraux, prêtres, diacres et laïcs se sont retrouvés à Belfaux le 12 novembre 2024 pour une journée cantonale de formation. Cette rencontre s’inscrivait dans le prolongement de celle du printemps dernier à Genève, qui avait pour thème « Osons le changement ».
« Le printemps dernier notre évêque, Mgr Charles Morerod, nous invitait à oser le changement, avec cette question : ‘ Et maintenant que faisons-nous ? ’ » rappelle Barbara Francey, responsable du Service formations. « Durant cette journée, nous voulons poursuivre dans cette dynamique et continuer à avancer ensemble à l’écoute de l’Esprit saint. Toutes et tous, nous avons choisi de mettre nos pas à la suite de Jésus Christ à travers un appel propre à chacun, avec nos différences et nos charismes. ‘Le temps est accompli, et le royaume de Dieu est proche. Repentez-vous, et croyez à la Bonne Nouvelle.’ (Mc 1, 15) En entendant cette parole de Jésus comment laisser la puissance de l’Évangile convertir nos communautés ? Cela demande un retournement personnel et communautaire. Nous sommes invités à nous questionner sur notre manière d’être et d’agir afin que notre mission porte toujours plus de fruit. »
Perspective sociologique
Pour nous questionner sur les changements à apporter dans notre pastorale, Diletta Guidi, sociologue des religions, nous a présenté une étude sociologique en lien avec nos réalités ecclésiales.
« La sociologie des religions étudie la religion comme un ‘fait social’. Elle se questionne sur le comportement des fidèles (ex. leurs croyances, pratiques, etc.) ainsi que sur la manière dont la religion interagit avec la société et, vice-versa, comment la société influence les cultes et les croyants. » Diletta Guidi précise : « Cette réflexion sociologique s’appuie sur des données scientifiques quantitatives, notamment celles issues de l’Office fédéral de la statistique, de l’Institut suisse de sociologie pastorale, du National Congregations Study, ainsi que des statistiques produites par l’Église. Elle intègre également des données qualitatives provenant de diverses recherches en sciences sociales et en sociologie du catholicisme.
L’objectif de ce travail était de :
Dégager des points d’attention;
Stimuler des initiatives de créativité;
Faire émerger des questionnements au sein de nos équipes / communautés;
Faire échanger et débattre les participants sur le type d’Église que l’on désire pour demain;
Montrer que la sociologie des religions peut être une ressource pour l’Église.
Diletta Guidi constate que nous sommes dans un contexte de triple perte :
Perte d’ «évidence sociale ». Les valeurs chrétiennes ne sont plus majoritaires.
Cependant, la sociologue nuance ces constatations. « La réalité sociologique contemporaine met également en lumière des signes d’espoir et des dynamiques de renouveau que cette synthèse propose d’explorer. »
La sociologue constate qu’en Suisse, bien que les personnes se déclarant « sans appartenance religieuse » soient désormais majoritaires, le catholicisme demeure néanmoins la principale religion du pays. Elle cite le sondage mené en 2016 par l’Église qui a permis de dégager deux profils de catholiques, ceux ayant une identité classique d’adhésion à l’Église comme voie naturelle pour suivre le Christ, et ceux ayant une identité catholique individualisée, vécue de manière privée ou du moins hors cadre religieux institutionnel. « En Suisse, les catholiques ‘culturels’ occupent une place importante, comme en témoigne le décalage notable entre la fréquentation des églises et le nombre de personnes continuant à payer l’impôt ecclésiastique. »
En Suisse, les catholiques ‘culturels’ occupent une place importante.
« Un aspect central dans l’analyse de l’état de l’Église contemporaine concerne la pratique religieuse. La diminution de la fréquentation des lieux de culte catholiques, en particulier de l’assiduité à la messe, suscite l’intérêt des sociologues et les préoccupations de certains acteurs religieux. » Diletta Guidi remarque que les « Suisses passent des célébrations religieuses à des rituels de passage laïcs. L’Église a de plus en plus de demandes à la carte. Nous voyons cela notamment dans les funérailles et les mariages. » Elle constate que les gens nous considèrent souvent comme une religion de guichet ou de services, dans une société individualiste en mutation et en perte de repères. « Je pense surtout à tous les catholiques sociologiques ou culturels, les catholiques de tradition. L’Église doit se questionner sur la manière de les accueillir et de leur donner envie de revenir dans la vie de la communauté et d’apporter leur pierre à l’édifice. »
Elle relève que les sondages montrent que malgré la sécularisation, la religion (y compris le catholicisme) demeure importante dans certains moments de la vie comme : les moments de crise, la maladie, etc. L’Église doit s’interroger sur la manière d’investir ces moments clefs dans lesquels les gens ont besoin de spiritualité et de soutien. « L’Église pourrait proposer un accompagnement spécifique lors des moments importants de la vie. »
Ce qui est réjouissant, c’est que cette crise de confiance n’est pas une crise de foi.
Elle observe également qu’il y a une énorme crise de confiance dans l’institution catholique. « D’après les enquêtes, les Suisses feraient plus confiance au système politique et au monde des affaires qu’à l’Église catholique. Nous voyons cela notamment par les sorties d’Église. Cependant, ce qui est réjouissant, c’est que cette crise de confiance n’est pas une crise de foi. C’est un désaccord avec l’institution, une crise de fidélité avec l’institution, une confiance qui peut se reconstruire. »
Diletta Guidi remarque que dans ce catholicisme minoritaire, il y a de la vitalité. « La minorité peut nous aider à revitaliser l’Église. Malgré une perte de vitesse, nous avons encore une population sensible au religieux et au catholicisme. La catholicité demeure malgré tout importante, 53,8% de la population fribourgeoise par exemple s’identifie comme catholique. »
Diletta Guidi se demande comment faire de l’ordinaire quelque chose d’extraordinaire afin que chacun trouve une place et rencontre Dieu. Nous sommes minoritaires, notre vitalité est d’autant plus importante. Soyons d’abord vifs de lui.
Dans une seconde partie, le Service formations a proposé quelques pistes de nouveautés ou champs de créativité à investir. L’abbé Pascal Desthieux a témoigné de son expérience des maisons d’Église qu’il a vécue au Havre, en Normandie. Une maison d’Église est un lieu d’accueil et d’écoute où il fait bon vivre. La Parole de Dieu est au centre de l’évangélisation. Dans chaque unité pastorale du Havre, il y a une maison d’Église. Les paroissiens sont sollicités pour collaborer à la vie de la maison. Ils deviennent ainsi des disciples missionnaires.
Barbara Francey invite les participants à surfer sur le site d’Ecclésialab, qui recense des lieux innovants en matière de pastorale. L’Ecclesialab est un laboratoire de recherche rattaché au centre de théologie pratique de l’Université de Louvain.
PROCHAINE SESSION DIOCÉSAINE
À la suite de la première journée du 7 mai 2024 et dans l’élan de la 2e assemblée synodale à Rome, la session diocésaine se déroulera, dans sa deuxième phase, de manière inédite et créative, les 13 et 14 février 2025. Le programme sera le suivant :
le 13 février 2025: journée en paroisse/UP/décanat en deux temps : entre prêtres, diacres et agents pastoraux laïcs puis en soirée avec tous les bénévoles intéressés en incluant des temps de prière/célébrations.
le 14 février 2025: à Renens, rassemblement pour faire unité autour de notre évêque Charles Morerod afin de partager, réfléchir, échanger et célébrer.